jeudi 31 juillet 2008

Aspects de quartier, le mien.

Garde-moi la place.


Rien ne sert de mentir!

Moi, j'fais pas comme tout l'monde.

Verre luisant.

Coucou? Trouvé!

My beautiful Laundret.

Se réveiller mort.

Un commentaire de Totem sur l'anesthésie et l'appréhension que, quoi qu'on dise, elle génère, m'a fait ressurgir à la mémoire cette expression que ma grand-mère employait lorsque j'étais enfant. Se réveiller mort. Cela ne veut rien dire, n'est-ce pas? Et pourtant, j'en pressens le sens.

Totem dit qu'après l'opération, le réveil est toujours bienvenu et un peu inattendu. Effectivement, si l'on n'a aucune conscience exacte du moment où l'on sombre dans le sommeil artificiel, on est, lorsqu'on se réveille, d'abord étonné puis profondément rassuré. Ce ne sera pour cette fois-ci encore. Je me demande toujours quel chemin de lumière on suit pour réintégrer la réalité. Un peu comme si une partie de nous, cerveau, viscères, que sais-je, appuyait sur l'interrupteur de nos pensées et les réactivait immédiatement. C'est cette immédiateté qui m'épate et m'enchante chaque fois.

Alors, imaginons l'inverse. Au plus profond du sommeil artificiel, une force, un aspect caché de notre être secret, qui veille, tapi en temps ordinaire et que l'anesthésie libère des barrières qui le tiennent d'habitude prisonnier, une contrée sauvage. Et cette force qui, au lieu du chemin de lumière, nous fait emprunter celui des ténèbres, jusqu'au bout, jusqu'à l'équivalent de l'éveil mais un éveil à la mort. Eveil possédant la même immédiateté et, qui sait, le même émerveillement.

Se réveiller mort, sous des allures de bon sens populaire subverti, n'était peut-être, pour ma grand-mère, qu'une manière de vivre sa foi et de la comprendre de manière plus tangible.

La route

Quelques heures seulement pour achever La Route, de Cormac Mc Carthy, prix Pulitzer 2007. Il est rare que je lise des prix, mais pourquoi pas, je n'ai pas non plus le snobisme inverse.

Sur la terre, on ne sait où mais cela n'a pas d'importance tant la catastrophe est planétaire, l'apocalypse a eu lieu. Tout a été détruit, hommes comme bêtes, villes comme campagnes, détruit,soufflé, renversé, brûlé, enchevêtré. On comprend peu à peu que quelques humains survivent, qui d'abord s'organisent puis, devant le manque, se détruisent et se dévorent, au sens propre comme au figuré. Il n'y a plus ni raison ni morale.

Un homme et un petit, un père et son fils fuient les bandits, les hordes de cannibales, poussant devant eux un caddie contenant leurs maigres ressources, et tentent de descendre au sud, mais sans l'espoir d'y trouver autre chose que ce qu'ils voient chaque jour et dont l'adulte essaie de préserver le regard de l'enfant. Il y parviendront, au bord d'une mer grise comme du plomb, se confondant dans ses nuances avec la cendre et le sable de la terre, avec les nuages et les souffles du vent, avec l'eau de la pluie et la neige des sommets. Le voyage s'arrêtera là pour le père, pour recommencer sans doute sous une autre forme (ou sous la même?) pour le garçon dont on pense qu'il vit une véritable initiation, sans savoir si c'est une préparation à la vie recréée ou à la mort universelle annoncée comme définitive.

Constat ultra pessimiste sur l'humanité ( et ce n'est pas, à mon avis, un hasard si Mc Carthy dédie ce livre à son fils John, comme un héritage cynique et désespéré), style dépouillé à l'extrême comme le sont les personnages et les conversations, pas d'ailleurs possible, seulement le présent et les présents pour un temps.

Les mots sont ceux d'un enfant, simples mais profonds parce que cet enfant a compris la mort même s'il est terrifié par le revolver qui constitue leur seule protection. Si l'on peut être agacé par quelques tics syntaxiques (phrases non coupées, alignant les "et" de transition), il est certain cependant que ce livre ne laisse pas indifférent le lecteur. Mais ce lecteur ne doit pas se leurrer: la route de Mc Carthy n'est ni celle de Kerouac ni surtout celle de Jack London. Et le chemin, bordé d'épines, ne finit pas dans de verts pâturages.

( Je ne peux citer ici d'extrait de ce roman, ayant déjà prêté le livre à Stéphane.)

C'est fait!

Voilà une bonne chose de faite, et que j'espère ne pas avoir à recommencer avant quelques années.

C'était une ambiance assez particulière, ce matin, dans cette clinique. Les trois établissements du secteur, Saint-Jean, Sainte-Anne et Jeanne d'Arc s'étant regroupés sur un autre site dans de nouveaux locaux baptisés Jean Mermoz, la clinique Jeanne d'Arc vivait ses derniers instants dans ses anciens murs. Ainsi donc, la salle d'attente était encombrée de cartons à déménager, le personnel, dont une partie rapatriée pour quinze jours de Ste Anne, ne savait pas très bien où se trouvaient les choses, des chariots traînaient inutilement dans les couloirs... Un souk plutôt qu'un établissement hospitalier.

Cela avait de quoi angoisser (d'ailleurs, n'avaient-ils pas égaré ma carte de groupe sanguin, entre l'infirmière et le cardiologue?), mais aussi de quoi détendre. Pour ma part, c'est la deuxième option que j'avais choisie. Ce remue-ménage, au lieu d'énerver le personnel, avait créé une sorte d'atmosphère bon enfant et conviviale, chacun aidant l'autre et plaisantant, tout en restant évidemment très professionnel. Je me suis vite mis au diapason et n'ai cessé de plaisanter que lorsque par traîtrise l'anesthésiste m'eut injecté sa dose sans que je m'en rende compte (j'avais une perfusion d'antibiotiques, peut-être y a-t-il ajouté le liquide d'endormissement?)

Un des moments les plus drôles fut celui où, en arrivant dans la salle d'intervention, on me mit sur la tête une charlotte pour protéger des cheveux. "Par pure habitude!" me dit en riant un des infirmiers qui, tout comme moi, avait un beau crâne lisse et rond.

Quelque temps après le réveil, heureux d'ingurgiter ma première nourriture solide depuis hier midi. Stéphane est venu me chercher et m'a raccompagné chez moi. J'ai alors découvert qu'il faisait une chaleur torride à Lyon aujourd'hui, ce que la climatisation de la clinique m'avait masqué. Tout va bien, à part une irritation persistante de la gorge (intubation de la gastro.?) et un léger mal de tête, que j'avais d'ailleurs déjà ce matin après une mauvaise nuit.

Demain ou un jour prochain, je retournerai dans cette clinique pour photographier un escalier que j'ai eu le temps de remarquer au passage.

mercredi 30 juillet 2008

Souvenirs, souvenirs.

Ce soir, pas de repas (coloscopie de demain oblige). Remplacé par un produit à effet garanti mais dont le goût a, heureusement, beaucoup évolué en cinq ans. Il faut boire ce flacon, consommable cette fois-ci, et ensuite absorber trois litres d'eau dans la soirée. Même pour quelqu'un comme moi qui aime ce liquide, ça fait un peu beaucoup. Demain, dès l'aube, re-petit flacon.

J'ai donc le temps et, même si cela risque d'être en pointillés (même raison alléguée), je tiens beaucoup à faire écho au dernier billet de Fabrice (Apartés uchroniques) qui, s'appuyant sur des extraits musicaux, évoque des souvenirs de différentes années de son enfance et de son adolescence.

Et moi, me suis-je dit, que faisais-je dans ces années-là? Qu'est-ce que ces musiques m'évoquent? Bien sûr, pas la même chose qu'à lui: la différence d'âge est de quinze ans. En 1971, il a quatre ans, moi dix-neuf, et j'arrive à Lyon.

Mais commençons par le commencement. Le Bourgeois gentilhomme, Molière, Lully, le XVII° siècle. Moi aussi, j'aime beaucoup ce siècle pour la pureté de sa langue. Molière bien sûr, mais surtout Jean Racine, dont je choisirais Phèdre pour emporter avec moi sur une île déserte comme seule compagnie livresque.

Cette musique de Lully me rappelle mon lycée, un grand lycée d'Etat de Saint-Etienne, où j'ai tout appris. Il y avait au sous-sol une salle totalement insonorisée où l'on nous passait, pendant les heures de permanence, des pièces classiques ou des documentaires pédagogiques dont les commentaires étaient dits avec des voix un peu compassées, des voix à la Claude Dargey(orthographe incertaine) dans les émissions animalières de Frédéric Rossif (Ah, le générique de La Vie des Animaux, avec ces yeux de chouettes brillant dans le noir, et le tatou passant entre les pattes des marabouts!). C'était dans les années soixante.

1971: j'ai dix-neuf ans, j'arrive à Lyon, pour mes études et aussi pour fuir mon père avec qui les rapports, à cette époque, sont assez tendus. Découverte de la grande ville, de l'autonomie, de la sexualité encore plus débridée, des boîtes de nuit (oui, Fabrice, je vois de quoi tu parles!).

A part le refrain de leur chanson, les Poppys ne me disent rien du tout. Dans les soirées homos, c'est encore l'époque du slow, avec Lenormand, Polnareff, la grande Mina, chanteuse italienne que je vénère encore aujourd'hui, et l'époque aussi du rock, avec Louis Prima et son Just a Gigolo. Combien de rêves ai-je fait, blotti contre un poitrail chaud et accueillant, pendant que Mina chantait Amore mio et que nos jambes s'enlaçaient autant que nos lèvres se pressaient?

1972: Pop corn. Là oui, je me rappelle très bien ce morceau. Énorme succès. Cette année-là, j'ai rencontré Pierre, au mois d'octobre, et j'ai eu vingt ans au mois de novembre. Début d'une longue histoire.

1978: Goldorak. Rien, mais rien. Je ne crois pas avoir vu un seul épisode. Je suis enseignant depuis deux ans: mes premiers remplacements, je les ai effectués en 1976, à Oullins. Je revois encore la porte de classe qu'il m'a fallu ouvrir et franchir pour donner mon premier cour. Le coeur d'un chrétien livré aux lions ne devait pas battre plus vite. Début donc d'une autre longue histoire.

Ensuite le billet de Fabrice m'a fait un plaisir immense en proposant la musique du générique de La Séquence du Spectateur. Catherine Langeais, effectivement, que je trouvais très belle femme. Il y avait même deux émissions dans la semaine: le dimanche à midi, c'était La Séquence du Spectateur. Mais le jeudi à midi, c'était La Séquence du JEUNE Spectateur. Et si je n'avais pas toujours le droit de regarder le dimanche, il était rare que je rate celle du jeudi. Moi aussi, Fabrice, je crois bien que c'est là que j'ai découvert mon amour du cinéma.

Enfin, les années 80. Disco and co. Bien sûr. J'atteignais tant bien que mal l'âge adulte. J'adorais Les Communards, Jimmy Summerville en particulier, qui ne faisait pas mystère de son homosexualité. J'ai eu l'occasion de le voir de très près un soir, alors que je promenais mon chien Place Guichard. Il donnait un spectacle à la Bourse du Travail et, avant de monter sur scène, prenait un moment de repos à l'une des fenêtres donnant sur la rue derrière la salle. Nous nous sommes regardés un moment, il m'a souri et fait un gentil signe de la main avant de disparaître dans le bâtiment. J'étais comme une midinette qui a vu son idole, les jambes en coton. C'est la première fois que je fais cette confidence.

Voilà un petit voyage dans mes souvenirs, grâce à toi, Fabrice, et je t'en remercie. Je penserai à toi demain.

Vous ne manquez pas de souffle?

Lorsque quelqu'un dort, près de moi dans un lit (ce qui est rarissime), dans un fauteuil à la sieste, comme ma mère dimanche, ou sur un siège de train, à un moment ou à un autre me vient toujours la même pensée: et s'il était mort? S'il avait oublié de respirer?

Je sais, c'est idiot, mais je ne peux m'empêcher d'avoir chaque fois cette réaction. Lorsque j'étais enfant, j'ai joué avec cette idée de la mort, m'amusant à effrayer ma grand-mère en arrêtant de respirer. Inutile de dire qu'elle n'avait pas apprécié et que cela a marché une fois, son épouvante, mais pas deux. A une de mes amies qui venait d'avoir une petite fille, toutes les dix minutes je recommandais, alors que le bébé dormait dans la pièce voisine, d'aller voir si tout se passait bien, si elle ne s'étouffait pas. Comme si la mort ne pouvait arriver que si l'on n'y fait pas attention! Peut-être ai-je été profondément marqué par les circonstances de celle de ma soeur, accidentelle, à un moment où je n'étais pas là, avec elle, moi l'aîné censé la protéger.

Alors, je fixe désespérément la personne, sans cligner des paupières, à m'en faire mal aux yeux, pour tenter d'apercevoir le mouvement de la respiration qui soulève le thorax ou fait légèrement frémir la lèvre, la narine ou la mèche de cheveux rebelle qui, dans le sommeil, s'est échappée du bandeau, et tant que je ne l'ai pas vu, je ne peux détacher mon regard de l'autre. Quand, enfin, le mouvement se produit, je retourne à mon livre ou à mes rêves, rassuré et me traitant d'imbécile, avant de recommencer la fois suivante.

Elles chaussent pieds.

Une autre expression que je n'aime pas et qui se généralise : avoir le moral dans les chaussettes. Les ménages français ont le moral dans les chaussettes, les Bleus ont de quoi avoir le moral dans les chaussettes, etc.

On va me dire que c'est encore ma bonne vieille fixation sur les pieds. Pourtant, pour moi, dans les histoires de mon enfance, ce que l'on mettait dans les chaussettes, c'étaient les cadeaux et friandises de Noël. Dans de très grandes chaussettes de laine.

Aujourd'hui, les chaussettes ayant considérablement rétréci, le moral a diminué d'autant, c'est mathématique!

Un voisin.

Il était tout près de moi et je ne l'avais jamais remarqué!

mardi 29 juillet 2008

L'Edification de Didon.

Retour du parc, encore. Ce soir, L'Edification de Didon, avec l'Ensemble Boréades et le Jeune Choeur Rhône-Alpes de Marie-Laure Teissèdre, choeur formé de neuf jeunes filles et d'un jeune homme.

Le spectacle raconte la prise de pouvoir par Pygmalion, le frère de Didon, qui a assassiné son époux. Didon, convaincue par ses suivantes, se résout à quitter Tyr et la Phénicie et atteint le rivage de Carthage, où le roi indigène accepte de lui concéder un territoire grand comme une peau de boeuf. Didon, rusée, découpe la peau en une fine lanière et ainsi obtient un espace beaucoup plus grand que prévu.

La ville prospère dans le commerce sur les mers, mais le roi presse Didon de l'épouser pour unir la force militaire à l'expansion commerciale. Didon renâcle longtemps mais, alors que, de guerre lasse, elle est prête à céder, arrive Enée, précédé de l'aura de sa gloire.

Il ne s'agit donc pas de Didon et Enée de Purcell, mais de la musique de ses plus beaux oratorios sur les reines: The Tempest, Ode for Queen mary et The Indian Queen. Musique entrecoupée de parties jouées par les chanteurs.

Belle réussite encore ce soir, surtout pour la musique et les voix (petit bémol pour la partie texte joué). L'idée originale fut aussi de déplacer le public à chaque moment du voyage de Didon: Tyr d'abord, puis la mer et enfin la péninsule de Carthage.

Je me suis retrouvé ainsi près d'un couple d'hommes, l'un jeune, l'autre d'environ mon âge, et j'ai vite vu qu'il ne s'agissait pas du père et du fils (on les aperçoit sur la photo précédente, au premier plan, tous deux en bleu). Ils m'ont beaucoup ému par la manifestation, discrète, de leur tendresse, de leur amour: un court instant, la main posée sur le genou; à la fin du spectacle, l'appui des jambes du jeune homme pour soutenir le dos du plus vieux tout en lui enserrant le torse de ses bras. Personne ne les a remarqués, ne les a observés avec mépris ou surprise. J'en étais profondément heureux.

Pendant le spectacle, une oie a pris son envol sur le lac, en frappant bruyamment les eaux, un cormoran est passé, un long branchage dans le bec. Pour construire un nid? Et, tout au fond, la nuit tombait sur les deux collines.

J'en reste assis.

Au prix où elles sont!

Cécile est bête.

Oui, oui, je fais passer!

L'Homme qui marche, de Giacometti

En triant de vieilles revues, je tombe sur un numéro de La Vie dont le supplément Les essentiels du 18 octobre 2007 était consacré à Giacometti. Cet article m'avait totalement échappé à l'époque. Il est principalement axé sur une interprétation par Paul-Louis Rinuy (voir Les essentiels n°3242) de la sculpture L'Homme qui marche, bronze de 1960 (Musée national d'Art moderne).

Je trouve cette analyse magnifique et ne peux résister à l'envie de vous la faire connaître. J'espère que ni P-L Rinuy ni Xavier Accart, qui a recueilli ces propos, ne m'en voudront de reprendre ici leurs mots.

Où va-t-il cet homme-là, que ses pas semblent conduire si résolument en avant? En 1960, Giacometti sait qu'il entame la dernière partie de sa vie et chacune de ses oeuvres prend alors une valeur plus inquiétante, plus radicale. Appartenant à l'espace même qui nous entoure, cette figure, grandeur nature, est d'une pureté essentielle qui nous impressionne. Car c'est bien de nous qu'il s'agit, nous qui marchons avec audace vers un avenir à la fois certain et imprévisible. L'harmonie des deux jambes portant bravement le corps ne fait guère illusion: la maigreur de la silhouette, le caractère tourmenté du modelé, tout nous révèle ici l'homme contemporain dans sa solitude, dans sa précarité.
Giacometti est le sculpteur de la finitude humaine, il met en scène un homme borné, limité autant par le terme physique de son existence humaine que par la douleur de l'absurdité de la vie. Et pourtant, ce flâneur de Paris, qu'était aussi l'artiste, savait d'expérience que la marche, la déambulation sans fin ni but possède un sens par elle-même. "L'homme qui marche dans la rue ne pèse rien, beaucoup moins en tout cas que le même homme mort ou évanoui", écrit-il. D'où vient cette miraculeuse légèreté? De l'équilibre formel, sans doute, mais plus encore de l'élan même de la vie, qui se nourrit de son propre mouvement. Tel est le vrai mystère: conscient de sa mort future, de l'inutilité de beaucoup de ses actions, l'homme trouve plaisir et bonheur à sa déplacer car il mesure l'espace en le parcourant. Dans l'instant de chaque mouvement, l'homme se révèle une force fondée sur son propre élan.
On trouve toujours, chez Giacometti, ce renversement miraculeux qui fait passer de la fragilité à l'éclat, du doute à la foi, inexplicable, irrationnelle mais souveraine. Peu importe donc d'où il vient et où va cet homme qui nous ressemble tant, il a la solidité du marcheur qui refuse de s'arrêter et se porte toujours en avant, toujours plus loin.
Et nous, sans savoir davantage qui nous sommes, mais forts de nos incertitudes et de nos faiblesses, nous pouvons marcher en soulevant le poids de note vie, le coeur gonflé du désir de découvrir le monde de demain, déconcertant et imprévisible sans doute, mais par là même merveilleux et attirant.


Pour son anniversaire, j'avais offert à J. une reproduction de cet Homme qui marche, par simple allusion à la vitesse de son pas et à son ouverture sur le monde. Aujourd'hui, en relisant ces lignes, je crois que mon intuition, inconsciente, était plus profonde et qu'elle m'englobait dans cette représentation. Ce texte est sans doute ce que j'aurais pu, ce que j'aurais aimé dire à J. et à moi-même si j'étais plus intelligent.

lundi 28 juillet 2008

Sport et lectures.

Comme la nuit tombe vite déjà.

Aujourd'hui il a fait très chaud, trop chaud pour certains, jamais pour moi. Je suis allé courir ce matin. Rencontré un collègue remplaçant, prof. d'espagnol, un chilien très secret et réservé avec qui nous avons cependant toujours échangé un bonjour amical et parfois quelques mots. Mais rien de fondamental. Ce matin, il m'a plus parlé que pendant toute l'année écoulée. Il se dégage de ce garçon une impression de profonde solitude. Je l'ai d'ailleurs revu après, assis sur un banc, face à une jeune fille qu'il semblait vouloir aborder. Au troisième tour, il était parti. J'ai failli lui proposer que l'on se revoie, parfois. Je ne l'ai pas fait. Ai-je, moi, des solutions pour tout un chacun alors que je n'en trouve pas toujours pour moi-même?

J'ai voulu aussi "faire les soldes", c'est-à-dire faire comme tout le monde. Résultat: des paires de socquettes pour courir et un polo taupe. Cela n'a aucun intérêt mais j'aime le nom de cette couleur et cette couleur elle-même. Alors l'employer de temps en temps évite de l'oublier.

J'ai en fait dépensé beaucoup plus en livres, pas en soldes eux, qu'en vêtements.
Les Pensées de Marc-Aurèle, suivies du Manuel d'Epictète: il y a très longtemps que je voulais me procurer ce livre. Terrasse à Rome, un roman de Pascal Quignard, auteur que je ne connais pas encore. Julien, de Gore Vidal, mémoires apocryphes de l'empereur romain Julien l'Apostat, neveu de Constantin le Grand. En tirerai-je un plaisir aussi intense qu'à la lecture des Mémoires d'Hadrien de Yourcenar, seul livre, pour l'instant, que j'ai envie de relire? Et enfin, dans mon édition préférée, Libretto de Phébus, un récit de voyage comme je les aime: L'Asie cavalière, de Shang-haï à Moscou, 1860-1862, de Catherine de Bourboulon.

Mais quand vais-je avoir le temps de lire tout cela, et le reste qui m'attend depuis déjà longtemps?

Ce soir, je reste tranquillement chez moi, quiet.

Train de nuit pour Lisbonne.

Un train un peu lent, à mon avis, comme tous les trains de nuit, d'ailleurs. Le roman de Pascal Mercier est, à ce détail près, fort intéressant.

Un professeur de lettres classiques de Berne, le modèle du genre (je sais de quoi je parle!), sérieux et immensément cultivé mais réfractaire au monde moderne, empêche une femme de se suicider en se jetant d'un pont. Cet élément profondément modificateur dans sa vie va l'emmener au Portugal, à Lisbonne, sur les traces d'un médecin mort trente ans plus tôt mais qui a semé les lieux où il a vécu d'écrits sur sur sa vie ou de pensées sur la mort, la confiance, la loyauté, et dont les amis ou la famille encore en vie aideront à reconstituer le portrait en même temps que l'énigme.

Bien sûr, au fur et à mesure de l'évolution de sa quête, le professeur quinquagénaire verra en filigrane apparaître son propre portrait, celui qu'il est réellement une fois ôté tout le vernis social et culturel.

Tout cela fort bien écrit, mais en 500 pages. Je ne sais d'ailleurs pas comment l'auteur aurait pu faire moins, tant son propos est vaste, puisqu'on se promène aussi dans les langues grecque, latine et hébraïque, et, de façon plus contemporaine, dans le Portugais, le Français et le patois bernois.

Sur mille expériences que nous faisons, nous en traduisons tout au plus une par des mots, et même celle-là simplement par hasard et sans le soin qu'elle mériterait. Parmi toutes les expériences muettes sont cachées celles qui donnent secrètement à notre vie sa forme, sa couleur et sa mélodie. Si ensuite, en archéologue de l'âme, nous nous tournons vers ses trésors, nous découvrons à quel point ils sont déconcertants. L'objet de l'observation refuse de s'immobiliser, les mots glissent le long du vécu et à la fin il ne reste sur le papier que des contradictions. Longtemps, j'ai cru que c'était un manque qu'il fallait pallier. Aujourd'hui, je pense qu'il en va autrement: que la reconnaissance du désarroi est la voie royale qui mène à la compréhension de ces expériences familières et pourtant énigmatiques. Cela paraît étrange et même bizarre, je sais. Mais depuis que je l'ai compris, j'ai le sentiment d'être pour la première fois vraiment éveillé et en vie.
(Trad. de Nicole Casanova.)

Déchirer le voile.

Découvert une reproduction d'un tableau de René Magritte, Les Amants (1928).
Un couple s'embrasse, lui en costume noir cravate, elle en robe ocre sans manches, sur fond de murs, de mêmes teintes un peu atténuées, et de corniche. Les deux amants ont le visage entièrement empaqueté dans des voiles blancs qui empêchent tout contact physique des lèvres.

N'est-ce pas cela, aimer? Ne pas voir, contempler seulement ses propres ténèbres que nous renvoie l'intérieur des paupières en croyant contempler l'autre, aimer cet autre parce qu'il ressemble à ce que l'on est, à ce qu'on pense être ou à ce qu'on voudrait être.

C'est une idée effrayante mais qui me passe souvent par la tête. Si c'est le cas, la solitude est l'essence même de l'humain et il n'y a plus qu'à serrer les pans de ce voile, qu'il étouffe le visage.

Sur ma mère, encore.

Tous les deux, nous aimons le café fort et très chaud, à se brûler le gosier.

Lorsqu'elle fait la sieste hors de son lit, elle a une manière de se tenir assez particulière: le corps totalement déjeté, les membres tordus dans des angles improbables, le cou quasi à angle droit avec le reste du corps, la silhouette même d'un supplicié après l'épreuve. J'allais lui en faire la remarque lorsque j'ai vu la façon dont je me tenais moi-même: la même.

dimanche 27 juillet 2008

Un grand soir.

Pourquoi ce soir précisément? Parce que j'ai eu la chance qu'il m'offre trois spectacles en un, trois bonheurs successifs ou concomitants.

A vingt heures, j'étais à l'amphithéâtre des berges du Rhône. Il faudra d'ailleurs que Lyon veille à ne pas galvauder en l'employant trop souvent ce mot d'amphithéâtre: il y avait celui des Trois Gaules, le vrai, le romain, à la Croix-Rousse; puis est apparu l'Amphithéâtre, la nouvelle salle de spectacles et de congrès à la Cité Internationale, près du parc de la Tête d'Or, et voici maintenant celui des berges du Rhône.

De quoi s'agit-il exactement? De l'aménagement, très réussi à mon goût, des anciens parkings automobiles sur les quais du fleuve en esplanades et plans d'eau ou de végétation. De cet endroit, on a un panorama magnifique sur le Rhône et l'Hôtel-Dieu de Soufflot au premier plan, et, derrière, sur la colline de Fourvière.

Je voulais assister au spectacle proposé par le Théâtre des Asphodèles, dans le cadre de Tout l'monde dehors: Arlequin navigue en Chine. Je l'ai vu mais j'ai vu aussi beaucoup d'autre choses.

D'abord, la vie de ses berges, où se côtoient en harmonie piétons, rollers, joggers et cyclistes, chacun marquant furtivement du reflet de sa silhouette les plans d'eau étale. La vie de la ville aussi, avec la scène devant mes yeux, le bruit des voitures sur l'axe nord-sud, la grande roue dont on aperçoit la cime au-dessus des toits, les clochetons de l'Hôtel-Dieu et en contre-jour, les échafaudages qui remplacent pour quelques mois la Madone de Fourvière et qui ne parviennent pas à être disgracieux. Cette ville bouge, vit, explose, est heureuse.

Et puis, la splendeur du coucher de soleil, là-haut, derrière "la colline qui prie", jouant avec la coupole de Soufflot, les quatre tours de Fourvière et inondant la ville d'une ultime rasade de lumière florentine.

Enfin, Arlequin navigue en Chine. Huit comédiens, italiens ou chinois, jouent, dansent, chantent, bondissent, grimacent, rient, fanfaronnent, roucoulent dans cette histoire mêlant très astucieusement Commedia dell'arte et opéra chinois.
Pas un temps mort, du rire sans arrêt, beauté des costumes et de la mise en scène avec pourtant des décors succincts, plaisir des langues diverses employées,en particulier l'italien, avec pour moi le privilège de l'entendre.

Et c'est en milieu de soirée que j'ai enfin compris pourquoi réellement j'étais aussi heureux ce soir. Je retrouvais l'homme que j'étais en 1981 lorsque j'assistais à Perugia, dans le théâtre de verdure, à la pièce de Goldoni, La Locandiera. Même langue, à mes yeux la plus belle, même atmosphère estivale, même splendeur de la nuit, même mélange de spectacle comique et de vie extérieure, même impression surtout de m'être enfin rejoint pour un instant. Une vibrante plénitude.

(Le spectacle Arlequin navigue en Chine se rejoue le mardi 29 juillet, place du Lac (3°arrdt,tout près de l'entrée sud du centre commercial de la Part-Dieu) de 20h à 22h. Lyonnais, ne manquez pas ça!)

Deux choses.

Qui n'ont (presque) rien à voir l'une avec l'autre.

La première qui va sans doute faire beaucoup rire Olivier: je viens de découvrir que, si je positionne mon appareil numérique sur Scènes, il y a en fait des sous-catégories que je n'imaginais même pas. Et, bonheur de ce soir, la position Portrait de nuit. Pour un peu, je passais des heures dehors à l'essayer. Ceci dit, le résultat ne me semble pas plus convaincant que cela. Autrement dit, le pied ou rien.

La deuxième que je partage aussi avec Olivier, dont je viens de lire le dernier billet. La mort du cinéaste égyptien Youssef Chahine. J'aimais cet homme. Je n'ai pas vu tous ses films mais j'appréciais son indépendance, sa révolte, et aussi sa finesse et son intelligence, que j'avais eu l'occasion de découvrir lorsque je l'avais approché à Lyon lors de la sortie de son film Adieu, Bonaparte, avec Patrice Chéreau. Adieu, donc, Monsieur Chahine.

Une journée avec ma mère.


Toute la journée tous les deux.

Le repas d'abord, avec des crevettes fraîches, parce qu'elle aime ça. Puis grande promenade: non, elle ne voulait pas un parc. Alors, nous avons descendu Gambetta, moi poussant le fauteuil, elle regardant les magasins, visiblement enchantée. Peu de voitures ce dimanche, de l'ombre sous les platanes et un petit vent frais: elle était heureuse.

"Arrête-toi, je veux regarder les chaussures. Tiens, un magasin de laines: la Maille d'Or. Ça existe encore?" Je lui ai montré les nouvelles installations des berges du Rhône,le bouquet coloré du quai Gailleton, nous nous sommes assis un instant Place Antonin Poncet, près du jet d'eau pour regarder les enfants qui s'y baignaient. Les jeunes enfants l'attirent de plus en plus. Pourquoi? Vous pouvez lui montrer la huitième merveille du monde, si un bébé est dans les parages, elle ne verra que lui.
Avant de remonter Gambetta, je l'ai poussée jusqu'à la grande roue, m'attendant sans trop y croire à voir apparaître un blogueur de ma connaissance et son chien. Mais non, rien.

La promenade l'a fatiguée, et moi aussi. Pendant que nous faisions un semblant de sieste dans mon salon, elle m'a réclamé, pour se rafraîchir, un gant d'eau fraîche, que je lui ai apporté avec une serviette de toilette. Faisant mine de dormir, je l'ai observée. Elle ne renonce à rien, et c'est ce qui me plaît chez elle: elle a voulu replier consciencieusement la serviette et ses mains la trahissaient. Je l'ai vue faire et refaire sans cesse, jusqu'à ce qu'elle soit satisfaite du résultat. Une fourmi qui se bat inlassablement avec un butin dix fois plus lourd et plus gros qu'elle. Mais qui sait qu'elle y parviendra.

samedi 26 juillet 2008

Friesz et Rameau.

Retour à la maison après un deuxième spectacle à la Tête d'Or: Tableaux de Rameau.

L'Ensemble Les Boréades, clavecin, violon et violoncelle, interprétait des morceaux baroques de Jean-Philippe Rameau en alternance avec la lecture, par des comédiennes, de lettres fictives de femmes au peintre fauve Othon Friesz. Ces femmes, Lilette sa compagne, Andrée sa femme, Blanche sa maîtresse, Berthe Weill et Karla Granoff, n'ont pas réellement existé mais sont tout à fait plausibles, selon l'auteur du texte avec qui j'ai échangé quelques mots à la fin du spectacle (et dont j'ai lamentablement oublié le nom) dans la vie du peintre.

Les textes sont fins, subtiles et drôles parfois, à l'image de la musique de Rameau. De plus, l'Ensemble les Boréades avait mis en circulation dans le public les photocopies en couleurs, regroupées en livret, des oeuvres de Othon (à prononcer comme la saison) Friesz dont il était question dans le spectacle.

(Un petit côté Caravage pour la photo, non? Comme pour la fillette du spectacle précédent, quelques couleurs à la Renoir?)

A mon interrogation du pourquoi cette association baroque de Rameau/fauvisme de Friesz, l'auteur m'a fait remarquer les "courbes et contrecourbes" nombreuses dans les tableaux de l'artiste, et rappelant la ligne essentielle du baroque en architecture, et le fait que, tout comme les oeuvres de Friesz sont surprenantes par leur diversité et leur divergence, la musique de Rameau est elle aussi changeante et variée, restant profondément française sans être forcément cartésienne.

Beau spectacle, très "intérieur", écouté avec recueillement par un public moins éclectique que celui du précédent, et malheureusement un peu abrégé par l'arrivée de quelques gouttes de pluie: un clavecin, ça n'aime pas l'eau! J'ai rarement vu une production aussi subtile et peu racoleuse. Le contraire de l'effet recherché à tout prix.

En sortant, j'ai arpenté à pied le Boulevard de Stalingrad, derrière le parc, et fait, comme à mon habitude, quelques photos nocturnes.



(P-S 1: le personnage bleu de dos sur la première photo, ce n'est pas le père Fouras!)
(P-S 2: mes questions à propos des photos ne sont pas de l'autosatisfaction, mais de réelles questions.)

Donald.

Tout à l'heure, avant le journal de 13h, j'ai écouté une émission que j'aime beaucoup sur France-inter, émission de Juillet seulement, je pense: Tous les Mickeys du monde. Voyage dans l'univers de Walt Disney avec beaucoup de détails sur le dessin, la musique, les voix, les ingénieurs, scénaristes, etc, etc.

Aujourd'hui, l'émission était consacrée à Donald. Mon personnage préféré dans ce monde un peu lisse du dessin animé américain de l'époque. Ce canard mal embouché m'a toujours beaucoup fait rire. Je me souviens des périodes de Noël où, lorsque j'étais enfant, nous avions droit à une émission de Pierre Tchernia, SVP Disney. Comme j'étais heureux lorsque je voyais apparaître le palmipède habillé en costume marin!

Mickey, par comparaison, est fade et convenu, un peu comme Tintin que je n'ai jamais aimé. De même j'ai toujours préféré Laurel et Hardy à Charlot, devant lequel je riais peu. Pourquoi préférer ces personnages plus anguleux? Parce que justement, ils sont anguleux. Donald me fait rire parce qu'il est colérique, grincheux, autoritaire, maladroit, rancunier, pas diplomate pour deux sous, qu'il ne réfléchit pas avant d'agir, qu'il croit toujours avoir raison (oui, bon, d'accord, sur certains points, on se ressemble un peu).

Et puis il y a les expressions du "visage", et le petit chapeau de marin qui en rajoute: bien posé à plat lorsque Donald est heureux, de travers sur le crâne, ruban en débandade, lorsque la colère gronde, sursautant au bout de son élastique quand le canard est surpris par la peur.

Et puis il y a la voix, dont on ne comprend pas les mots prononcés, mais qui parvient toujours à donner un sens à ses borborygmes et éructations consécutifs. Moi, je ne me lasse pas de cette voix. Ni d'ailleurs de la musique de tous ces dessins animés, dont l'audition, où que je sois, me ravit d'aise chaque fois.

Donald est d'ailleurs, me semble-t-il, devenu encore plus célèbre que Mickey. On lui a adjoint Picsou, un oncle radin, des neveux facétieux, Riri, Fifi et Loulou que le bon tonton essaie d'élever tant bien que mal et qui le font souvent tourner en bourrique (Un bonjour en passant aux neveux d'Isabelle! On ne sait jamais, si l'un d'entre eux tombe sur ce billet!).

J'ai même appris, au cours de l'émission, que, dans un des films où Donald n'est pas uniquement le faire-valoir de Mickey mais tient le rôle principal lui-même, les studios Disney, pendant la deuxième guerre mondiale, se livrent à une critique féroce du régime nazi installé en Allemagne hitlérienne. Donald comme symbole des valeurs occidentales de liberté? Pourquoi pas. Il aurait fallu que cela reste ainsi jusqu'à nos jours, sans être remplacé de façon trop évidente par les valeurs du commerce (même si cet aspect a toujours été présent chez Disney).

Quand l'émission s'est terminée, j'étais heureux comme un gosse et, en allant m'étendre sur le canapé du salon pour une petite (grosse, vue la nuit passée) sieste, je me suis surpris à mimer une des colères de ce vieux fou de canard. C'était, il y a quelques années, une de mes principales attractions, qui faisait rire tout le monde aux repas de famille. Vous voulez voir, et surtout entendre. Écoutez:....... Ah oui, ben non, il vous faudra seulement imaginer. La prochaine fois qu'on se voit, promis!

Angoisses.

Profitons pendant que ça marche!

Hier soir, alors que je passais tranquillement d'un billet à l'autre sur ma blogosphère personnelle, tout à coup, je n'ai pu retrouver mon propre blog puis la totalité des autres. Impossible d'accéder à Internet. J'avais auparavant procédé à la mise à jour de ZoneAlarm qui, comme le disait le message, était "absolument nécessaire pour résoudre le problème introduit par la mise à jour de Microsoft KB951748" qui pouvait causer la perte de la connexion internet pour les utilisateurs de ZoneAlarm sur WindowsXP. Voilà. Simple, non? Déjà il faut arriver au bout de cette phrase qui pèse un quintal. Ensuite, avoir la connexion bloquée par une mise à jour qui est sensée justement éviter ce problème, c'est cocasse!

Résultat: couché à 2h, pour tenter de comprendre et de remédier. On se sent tout petit dans ces moments-là. Réveillé à 4h. Angoisse: comment vais-je faire sans J. qui part en vacances? Est- ce que je peux décemment me permettre de lui téléphoner ce samedi alors qu'il aura certainement des tas de choses à faire? A 8h, debout. Inutile d'insister. Une nuit gâchée par les sueurs froides et chaudes.

J'allume mon ordinateur et là, miracle: ça marche. Comment? Pourquoi? Je n'en sais fichtre rien. Combien de temps cela va durer? Je le sais encore moins. Simplement, si je disparais ces jours-ci de mon blog, c'est soit que je serai mort de l'anesthésie générale de jeudi en vue d'une gastro-coloscopie (de contrôle), soit que ZoneAlarm aura encore fait des siennes. Dans les deux cas, le plus embêté, ce serait bien moi, je pense!
P-S: je viens,tremblant comme une feuille, d'éteindre et de rallumer l'ordinateur, ça marche toujours!

vendredi 25 juillet 2008

Pluie du soir, espoir.

(Rue Garibaldi)

A peine trois pas, et la pluie.
Quelques gouttes d'abord, puis de plus en plus drue. Demi-tour? Non. Ce qui me retient dehors, c'est qu'une partie de mon quartier est plongée dans l'obscurité. Les orages ont sans doute détraqué quelques connections du réseau. Ainsi suis-je totalement seul à errer dans les rues avoisinant la Communauté Urbaine. Le frais arrive avec l'averse. Impression de respirer, enfin. Les rares individus que je rencontre se hâtent et me regardent avec mon appareil un peu comme un zombie.

(idem)

Place de Cuirassiers, de vieux arabes discutent sur un banc, à l'abri d'un passage. Dans certains immeubles, les gens sont aux fenêtres, profitant du rafraîchissement. En revenant sur Gambetta, je croise le retour de la randonnée rollers du vendredi soir. Apparemment, J. n'y est pas. Fatigué de son dernier jour de travail? Prévoyant sur le temps incertain? Déjà rentré après avoir fait une partie du chemin seulement? Mais là où il va, il a découvert une piste l'an dernier. Il pourra pratiquer son sport favori même en vacances.

(Eglise arménienne St-Jacques, rue A. Philip.)

Les photos prises ce soir ne vont pas révolutionner l'art, sachez-le. D'ailleurs j'étais en manque d'inspiration. Je crois que ce qu'il me fallait surtout, c'était sortir, prendre l'air, ne pas rester enfermé ici. J'ai ressenti ce besoin toute la journée. Voilà qui est fait. Allons maintenant lire ce que mes camarades de jeu ont écrit pendant que je tentais de passer entre les gouttes.

Soir d'été.

Ce soir, Lyon est sinistre: ciel bas, très nuageux, chaleur d'orage qui ne se déclenche pas, personne sur les trottoirs, même les voitures semblent vouloir se faire rares. Je n'aime pas être seul ces soirs-là, ces grands soirs d'été où la nuit n'en finit pas de tomber.

Tout à l'heure, quand l'obscurité se sera installée, je sortirai, avec vélo et appareil photos. Même si la plupart des clichés réalisés de nuit avec mon appareil actuel sont à jeter, il reste que certaines photos sont surprenantes. Pourquoi sont-elles nettes, pourquoi affichent-elles de telles couleurs? Je n'en sais rien. Le hasard absolu. Mais quelle joie en rentrant, plus tard, de voir apparaître, après les avoir installées sur le logiciel, des images intéressantes, en tout cas pour moi.

Dans la grande cour intérieure où donne sans doute la population d'un véritable village urbain, personne. Toutes les fenêtres sont fermées. Seules deux étudiantes se préparent à se mettre à table. Je n'entends que la télévision de ma voisine du quatrième, gentille mais sourde. Ce soir, je lui suis presque reconnaissant de mettre un peu d'animation.

J'ai fait mon tour de lac ce matin. Là aussi, personne, ou presque. J'ai l'impression que le mois d'août est commencé avec une semaine d'avance. Personne à courir, personne à la plage alors qu'il faisait beau.

J'entends le générique du journal de TF1. Il faudra que je demande à cette voisine ce qu'elle ressent, maintenant qu'elle n'a plus PPDA tous les soirs. Il faudra peut-être aussi qu'un jour ou l'autre, je rallume mon poste,ne serait-ce que pour voir s'il fonctionne encore.

Mais pas ce soir. Ce soir, je vais me faire un petit plaisir, du moins j'espère: circuler dans les rues et en rapporter une moisson de photos à ma convenance. Pour finir, et pour permettre à la nuit de s'installer totalement, un petit aperçu de celles d'hier soir, à l'aller pour la Tête d'Or ou sur le retour.

Rasante.

Jeu d'eau.

Diapason.

Halloween?

L'oeil était dans la tombe et regardait Caïn.

Of course!

Atmosphère.

Même chose avec flash. Laquelle préférez-vous?

Ambiance.

A tout à l'heure, sûrement.

jeudi 24 juillet 2008

Soirée dans la lignée.

Très bonne soirée aussi. Au parc de la Tête d'Or. Non, ni pour courir, ni pour .... courir. Pour du culturel. Après les "Dialogues en humanités" découverts par hasard il y a quelque temps, je fais davantage attention à ce qui se passe à Lyon. L'été, la ville, comme sans doute d'autres villes, propose de nombreux spectacles gratuits, et certains sont, ma foi, d'excellente qualité.

C'était le cas ce soir avec, à 20h30, dans la petite clairière près du vélodrome, un spectacle musical proposé par la Compagnie Barbaroque, cinq musiciens, quatre hommes, une femme, un peu décalés et très originaux. Affublés d'instruments dont la réunion pouvait surprendre - mandoline, orgue de barbarie, tympanon,...-, ils alternaient des moments musicaux avec la lecture d'extraits d'un Voyage en Italie de Jean Giono.

Ainsi eûmes-nous droit à un itinéraire dans la botte, s'arrêtant à Florence et Rome mais privilégiant Naples et la Campanie, où la musique de Nino Rota préludait à l'Orfeo de Monteverdi et aux chansons lyriques du répertoire napolitain. Le tout mêlé d'humour et de petites trouvailles scéniques qui détendaient régulièrement l'atmosphère sans jamais faire perdre le fil du voyage ni l'émotion soulevée par certains airs.

Grande attention et grand respect d'un public, pourtant très hétérogène, du couple maghrébin avec une petite fille qui dansait habillée en princesse à la dame bourgeoise qui s'est empressée à la fin du spectacle d'aller confier à l'un des artistes qu'elle séjournait chaque année en Toscane.

J'y ai retrouvé quelques collègues femmes, anciennes ou actuelles, que j'ai vite abandonnées en sortant pour enfourcher mon vélov' et tenter encore quelques photos nocturnes. Elle est pas belle la vie? Certains jours, si!

Et journée itou.

Pas de panique: je frétille encore et je suis sorti de la douche depuis un bon moment déjà. Journée bien remplie et qui a tenu ses promesses. D'abord avec le temps, beau et chaud, ou chaud et beau, comme on veut. Ensuite avec les occupations, multiples et variées.

Pour commencer, une prise de sang, afin d'établir ma carte de groupe sanguin. Lorsque j'ai sorti l'autre jour celle que je possède, on m'a regardé, perplexe, en me demandant: "Savez-vous qu'elle date de 1970?". Oui, je le sais. Et alors? Je sais aussi que je date, moi, de plus longtemps encore. Elle n'était plus valable. (Le suis-je moi-même encore?). Ce matin donc, double prise de sang, car il en faut deux pour que la carte soit réglementaire, faites par deux personnes différentes qui, toutes les deux, doivent vérifier mes nom, prénom, date de naissance et adresse. Comme si j'avais déménagé le temps d'une piqûre au bras. Kafka ou Jarry? Sans doute aussi les deux à la fois!

Pour me remettre, petite visite chez le coiffeur. "Qu'est-ce ce qu'on vous fait?" Devine! Il serait plus beau, j'aurai risqué un "Ce que vous voulez!" (je vous ai dit que ce matin, j'étais frétillant) mais il ne m'inspire guère que des conversations de salon de coiffure, c'est à dire des monologues où il tient le premier rôle et me dit pour la dixième fois qu'il connaît Eric Cantonna. Et moi de m'esbaudir! Alors, ce matin, sans l'avoir prémédité, peut-être parce que la coupe serait plus vite faite, peut-être parce que cela faisait longtemps que j'en avais envie, je me suis fait tondre, oui, entièrement, et je suis assez content du résultat. Ce fut à lui de s'esbaudir: "Quel beau crâne vous avez, bien régulier!". C'est toujours ça de pris.

Dix euros plus tard, préparation du pique-nique avec J. Le dernier de la saison, puisqu'il part en vacances dimanche, pour trois semaines. Nous nous installons au même endroit que la fois précédente. Il a son nouvel appareil photos, un bridge, sans doute très performant mais que je trouve assez volumineux.

Allez, on rebondit. Départ pour Miribel et le soleil. Je retrouve Raphaël, un garçon très sympathique avec qui j'aime rire et plaisanter. J'apprends aujourd'hui qu'il est stéphanois, comme moi. Nous devons nous appeler pour courir ensemble. Le temps passe très vite en sa compagnie et il n'engendre pas la mélancolie. Un troisième lascar, stéphanois lui aussi, se joint à notre conversation. Je les quitte à regret pour rejoindre ma mère en fin d'après midi.

Et ce soir, c'était sortie encore. Mais je vous raconterai ça plus en détails dans le billet suivant.

Matin chaud.

Un billet au réveil, c'est rare. Oui, pour moi, c'est le réveil. J'ai un peu honte vis-à-vis de certains qui sont déjà debout à 6h, voire plus tôt, mais je me suis couché tard: petite soirée entre amis, avec Isabelle et ses boys (Stéphane, Christophe, célibataire pour la semaine, et moi). Et bien entendu, apéritif doublé et vin. De quoi alourdir le sommeil!

Ce matin, bruit dans la cour: mon voisin du rez-de-chaussée remplace sa fenêtre. Grand soleil sur le balcon, à l'est. Ciel bleu intense, pas un nuage. Fenêtres à l'ouest encore à l'ombre, fraîcheur de mon bureau. Dans la rue, les voitures laissent échapper de beaux avant-bras dorés et veloutés, vite avalés, hélas, par la circulation. L'immeuble d'en face, celui aux multiples nationalités, reçoit des plâtriers, des peintres, dans leur "blanc" de travail. J'aime ça. Érotique. Je me sens tout frétillant, ce matin. La chaleur, sans doute. Il va falloir que je me calme, d'une façon ou d'une autre. Tiens, je vais déjà prendre une douche.

mercredi 23 juillet 2008

Pas de souci.

Un nouveau tic de langage: "pas de souci". Avez-vous remarqué comment cette expression fleurit à tout bout de champ dans les conversations? Posez une question fermée (ça, c'est de la grammaire) et vous n'obtiendrez pas souvent la réponse attendue, oui ou non, mais celle-ci: y a pas de souci!

Outre le côté franchement vulgaire du "yapa" dans certaines occasions (entre copains, d'accord, mais pas face à des inconnus), cela ne veut rien dire. Le souci a remplacé le problème, qui était tout aussi impropre dans ce sens-là. Et sa généralisation m'exaspère: dans les magasins, dans les cabinets médicaux, agences immobilières, SNCF et j'en passe, en fait partout où l'on peut poser des questions et attendre des réponses précises.

Cela m'exaspère d'autant plus que se concrétise par là une tendance plus qu'affirmée au je-m'en-foutisme, au "allez-dégage vite", au "ça, c'est ton problème, mon gars", mais passée au moule baba et cool, bobo et perso. On évacue la difficulté avant même qu'elle n'apparaisse, on ne veut surtout pas la voir, car il faudrait alors la traiter, et on a autre chose à faire, franchement, même si on est payé pour ça: bavarder avec sa camarade, aller fumer son mégot, prendre un café entre copains, se faire les ongles, discuter du dernier match de l'OM... De toute façon, l'individu concerné par le souci nié ce jour-là verra bien plus tard, quand, inévitablement, le souci apparaîtra. Mais il n'aura plus en face de lui l'adepte du "Yapadsouci" qui, lui, s'en sera tiré à bon compte. C'est un autre qui récupérera le bébé!

Voilà, c'était ma remarque réac. du jour. Allez, cool...

Amour posthume.

Hier, je ne devais pas rendre visite à ma mère. Ma soeur et mon frère étant en vacances, elle allait donc se retrouver seule pour la journée. J'avais bien sûr prévenu les infirmières de mon impossibilité à me libérer pour son repas du soir et elles allaient s'en occuper elles-mêmes.

Et puis, je n'ai pas tenu. Il faisait tellement beau que je ne pouvais l'imaginer dans sa chambre, fraîche mais sombre, devant l'étape du tour de France ou à rêvasser tristement en regardant l'arbre de la petite cour sur laquelle donne sa fenêtre. J'ai trouvé, dans l'après-midi, le temps d'y passer rapidement.

Quand je suis arrivé, elle n'était pas dans cette chambre, ni au salon. Ainsi donc dit-elle vrai lorsqu'elle nous assure qu'après le repas de midi, elle va seule faire une promenade dans le parc de la clinique. Je l'ai aperçue assise sur un banc, à l'ombre des bambous. Elle aussi m'a vu immédiatement. Même de loin, je ne pouvais pas ne pas remarquer le sourire qui a illuminé son visage quand elle m'a reconnu. Je venais de lui faire une joie immense. Et qu'est-ce que cela m'avait coûté? Cette joie effaçait pour moi tous les accueils mitigés dont elle me gratifie parfois en me voyant arriver à la place de ma soeur.

Nous sommes restés assis un moment, elle encore toute tremblante de son émotion, puis elle a voulu me montrer son parcours quotidien. Elle s'installe d'abord sur un banc qui lui permet de voir bien en face les portes du garage et de l'atelier où mon père bricolait pour la clinique. Puis la deuxième station se fait devant la serre, lieu encore plus marqué de la présence de mon père, puisque son rôle officiel était d'entretenir et de fleurir ce parc. Enfin, elle termine son tour sous les bambous, là où je l'ai trouvée, là où, une fois mon père malade et affaibli, ils avaient coutume de s'asseoir.

Ainsi, ma mère procède-t-elle chaque après-midi où le temps le permet à ce voyage dans ses souvenirs, à cet hommage à mon père, à cette preuve d'amour posthume. Quelque chose que je n'aurais pas su si je n'avais pas sacrifié ce petit bout de mon temps à son bonheur à elle. La découverte m'a profondément touché. Ma mère n'est pas qu'un monument d'égoïsme édifié par la vieillesse et la maladie. Parfois celle que j'ai connue autrefois réapparaît pour un instant, parfois je la retrouve comme je l'ai aimée, profondément.

Et puis ses craintes, ses angoisses l'ont reprise, l'angoisse de l'heure surtout, et elle a voulu que je parte, s'inquiétant que je sois en retard à mon rendez-vous.

Paix soit.

Rencontré hier dans le roman de Pascal Mercier, Train de nuit pour Lisbonne, cette citation de Fernando Pessoa qui me parle:
Je crois qu'exprimer une chose, c'est lui conserver sa force et lui ôter l'épouvante.
Voilà qui répond à ma nécessité d'écrire, à mes scrupules sur une certaine impudeur, voilà qui m'explique les débuts et les longues courbes de ce blog, voilà enfin et surtout qui m'encourage à écrire sur Pierre, quand je pourrai le faire. Même si tout cela relève avant tout de l'égoïsme le plus primaire.

mardi 22 juillet 2008

Empathie.

Un peu de sérieux, maintenant, mais toujours dans le domaine de la radio (et, je suppose, de la télévision).

Un avion s'écrase: soixante-trois morts. Bilan du week-end de Pâques sur les routes: vingt-deux tués et cent soixante blessés. Tremblement de terre en Iran: des milliers de disparus et de sans-abri. Sans parler des tsunamis et autres avions jouant à casse-gratte-ciel.
D'autres exemples: l'inflation s'élève ce mois-ci à 0,5 pour cent. Les vols à la tire ont augmenté de 2% par rapport à l'année dernière. La part des dépenses alimentaires dans le budget des ménages français a progressé de (là, je ne risquerais pas un chiffre, ayant peur d'être trop loin de la réalité).

Des chiffres, des chiffres, des chiffres. J'aime les chiffres, je les ai toujours aimés, mais quand ils sont gratuits, comme une version latine, comme la récitation d'un beau poème. Je ne les aime plus quand, comme ici, ils servent à la seiche journalistique ou politique pour jeter son encre à la tête du citoyen. On nous endort avec ces litanies de nombres. Cela reste totalement abstrait et le nombre de morts sur les routes n'empêchera personne de prendre sa voiture pour le week-end et de conduire comme un fou en se prenant pour un as du volant. On s'apitoie sur les sans-abri mais on les oublie lorsqu'on se retrouve bien au chaud sous la couette, alors que dehors, la température baisse à -20°.

Qui pense que, derrière le chiffre de trois enfants exécutés au bord d'un route par un chauffard ivre, il y a des parents dont les jours suivants vont être occupés à dépasser leur douleur pour organiser les funérailles, pour mettre en terre celui ou celle qui devait les accompagner chez tante Louise dans le Gers. Ensuite, ce seront des années de souffrances et de pleurs qui ne parviendront pas à combler le vide sidéral du départ de l'enfant.

Je ne cherche pas à faire facilement pleurer dans les chaumières. Ce que je veux dire, c'est que je ne supporte plus cette information aseptisée qui cache la partie humaine des drames derrière des colonnes et des statistiques. Je ne veux pas non plus que tel ou tel présentateur télé qui se fait un nom dans le larmoyant prenne l'affaire en main et profite d'une émotion bon marché pour conquérir encore un peu de notoriété et de parts d'audimat. Ce que je veux, c'est qu'on repense un peu plus à l'homme, qu'on n'évacue pas la souffrance humaine, qu'on ne la mette pas en scène non plus, mais que l'on sache qu'elle existe et qu'on la respecte.

Momentini.

- Encore du soleil ce matin sur la plage de Miribel, et un vent frais très agréable quand l'astre du jour (périphrase précieuse) ne se voilait pas derrière quelques nuages incongrus. Au retour, une brassée de fleurs de papillons (eh oui, je suis coincé: comment s'appelle la fleur de l'arbre à papillons? Pour moi, ce sera comme ça).

- Qui, sur le parcours du Tour de France, pourrait se charger de tordre le cou au commentateur sportif qui couvre l'événement sur France-Inter? Insupportable! A croire qu'il a passé l'étape à courir derrière les vélos, tant il souffle, il crachote, il essaie de reprendre son souffle. Quel est donc cet excité incapable de parler comme tout le monde, qui croit rendre ainsi plus palpitantes ses interventions, comme s'il se passait justement quelque chose d'important chaque fois qu'on lui ouvre le micro, alors qu'il ne contribue qu'à les rendre inaudibles et à mettre en boule les nerfs de l'auditeur que je suis, et sans doute de quelques autres?
Je dois pourtant avouer que les accents compassés de certains présentateurs de musique classique me tapent autant sur le système. Restons simples! Ce n'est pas parce qu'on est commentateur sportif que l'on souffre les affres du coureur, ce n'est pas parce que l'on présente un opéra que l'on va mourir dans l'heure d'une phtisie galopante, ce n'est pas parce que l'on est Carla Bruni que l'on doit se prendre pour Barbara!

- Hier, toujours sur France-inter, je ne sais plus quel chanteur parlait de sa guitare. Peu attentif au début, j'ai cru, par les mots de tendresse employés, qu'il évoquait sa femme. A-t-il, avec elle, un vocabulaire aussi étendu?

- Entendu dans la salle d'attente d'un cabinet médical, cet après-midi ( une dame répondant à une amie): - Tu dis que je n'ai pas mauvaise mine? Pourquoi aurais-je mauvaise mine? Il n'ont pas commencé à me soigner!

Sex symbol?

Je me crois revenu en classe. Quand je dis à mes élèves que ce dont je vais leur parler n'est pas à retenir, qu'il s'agit d'une simple parenthèse, je peux être sûr qu'ils en auront un souvenir parfaitement clair des mois plus tard, alors que la leçon importante de grammaire ou d'orthographe sera, elle, depuis longtemps oubliée.

Eh bien, sur ce blog, c'est la même chose. Je m'escagasse à écrire un billet sérieux, références et bibliographie à l'appui, sur des aspects culturels de notre société. Résultat: rien, pas le moindre petit morceau de mouche ou de vermisseau. Pardon, je m'égare: pas la moindre réaction, pas le moindre petit commentaire. J'avais pourtant trouvé un titre que je trouvais accrocheur, mais rien!

En revanche, lorsque je préviens que l'on racle les fonds de tiroir de l'imagination bloguesque, alors là, tous présents! On bat des records de commentaires. Je vais finir par croire que mon physique vous intéresse davantage que ma culture. Bon d'accord, mais tout de même! Vous risquez d'être fortement déçus, et, pour ma part, j'ai toujours fait davantage confiance à ma tête qu'au reste de ma personne.
Alors voilà, on va remettre un peu d'ordre dans les rangs. Elève Piergil, date de la bataille de Marathon? Quoi? Parlez plus fort, mon ami! Ah! Il est absent aujourd'hui... Bon alors, récréation. Quand je le dirai, élève Autissier! N'oubliez pas que la cloche, ici, c'est moi.

lundi 21 juillet 2008

On touche le fond!

Voici ce que j'appelle un article de fond. Entendez par là fond de tiroir, lie de la bouteille, gras figé au fond du plat en fin de repas. Mais tant pis, je suis lancé.

En un mot comme en cent (et notez que pour ne rien dire, j'en ai déjà utilisé une vingtaine), le mot qui pour moi est "intapable" sur le clavier, c'est le mot "même". D'ailleurs, à l'instant, pour le faire apparaître correctement, j'ai dû ralentir considérablement la frappe. Sinon, c'est l'horreur. C'est chaque fois autre chose qui s'affiche sur l'écran: m^eme, mmême, m^^eme, em^me, et tant d'autres fantaisies dues à ce fichu accent circonflexe. Je sais, on tolère aujourd'hui la suppression de cet accent compliqué dans un certain nombre de mots (pas à "même", à ma connaissance). Mais sur ce point, je suis un ayatollah (ça aussi, c'est coton à écrire!): jamais! Tant que j'enseignerai, mes élèves apprendront âge, abîme, vêtement (et nénuPHar aussi d'ailleurs), etc. Alors je l'emploie chaque fois qu'il le faut mais lui ne se laisse guère apprivoiser. Difficulté aggravée par le fait que je tape plus vite d'une main que de l'autre, donc inversion fréquente de lettres.

Je vous l'avais annoncé: c'est passionnant. La prochaine fois, je vous dirai quelle est la main la plus rapide. J'espère que je ne vais décourager, par ce genre de confidences de la plus extrême importance, mes fidèles lecteurs qui, si j'en crois mes espions, sont de plus en plus nombreux chaque jour. J'en connais même qui y viennent plusieurs fois dans la journée. Non, pas de noms, je ne "rapporte" pas. Mais je suis flatté, très flatté. Tiens, pour un peu, je vous ferais la bise. Ca valait le coup de lire jusqu'au bout, non?

Et puis, re-tiens, c'est jour de bonté. Il n'y a pas de raison que l'un d'entre vous m'ait vu "en vrai" et que tous les autres doivent se contenter de mon ombre une fois apparue dans ce blog. Alors, ce soir, je dévoile. Regardez là, en dessous, c'est moi. Non, pas le monsieur bedonnant à la chemise à carreaux rouges, l'autre, en bleu et blanc, celui qui prend la photo, quoi. Eh oui, je n'ai qu'un petit zoom!

Rencontres hasardeuses.

Deux nouveaux petits exemples d'une certaine inconséquence dans la publicité. Vous vous rappelez sans doute du "Nunc est bibendum" (Maintenant il faut boire) de chez Michelin pour lancer un de ses modèles de pneus.

On retrouve le même paradoxe ailleurs. Ainsi, en 1926, l'huile Spidoléine pour moteurs de voiture fait appel pour mieux se vendre à une déesse romaine relativement secondaire, Fortune. Le slogan: La Fortune graisse à la Spidoléine, faites comme elle. La vie de votre moteur en dépend. Or Fortuna (principe féminin, alors que Fors est le principe mâle du Hasard) est une déesse le plus souvent aveugle. Elle est d'ailleurs ici représentée les yeux bandés. Que fait-elle sur l'affiche? Elle graisse les roues de la voiture, en principe pour éviter un accident terrible à l'automobiliste. Moi, quand je repense au jour où, en allant au travail au volant de ma voiture, j'ai glissé sur une plaque d'huile, je ne peux pas dire que huile et pneu soient vraiment la solution de sécurité à préconiser. Et je n'avais pas les yeux bandés!

Autre exemple: un cendrier de verre, sans marque apparente de cigarettes, il est vrai, dont le fond d'un beau gris est occupé par le buste en relief de Hygie, la déesse grecque de la santé (son nom a donné le nom commun hygiène), fille d'Asclépios (Esculape chez les Romains). La rencontre est aujourd'hui hasardeuse!

(Ces exemples sont tirés du livre déjà cité Archéopub, la survie de l'Antiquité dans les objets publicitaires. Les interprétations sont miennes. Pour ceux qui voudraient un peu approfondir les mythologies, je conseille vivement ce que je crois être la Bible en ce domaine: Dictionnaire de la Mythologie grecque et romaine, de Pierre Grimal, aux Puf (1951). Ou, pour des recherches très poussées, Le Dictionnaire de la Mythologie et des Antiquités grecques et romaines, de Pierre Lavedan (Hachette): ce dernier ouvrage, datant de 1931, est une somme magistrale sur le sujet, érudite et passionnante, la plus complète qui soit. Livre probablement épuisé et introuvable. Je ne dois le bonheur d'en posséder un qu'à l'intervention de Fortuna qui, un jour, a ouvert les yeux au moment où il le fallait, c'est à dire m'a fait être là alors qu'un ami peu regardant s'apprêtait à jeter ce livre à la poubelle!)

L'arbre à papillons.

La réponse ne s'est pas faite attendre. Je me demandais l'autre jour le nom de cette plante à fleurs ressemblant au lilas et embaumant le miel. Il s'agit du buddleia, autrement nommé arbre à papillons car son parfum prononcé attire de nombreux insectes dont les papillons.

Alors que je n'avais jamais entendu ce nom-là (je connaissais arbre à papillons mais n'avais pas fait le rapprochement), le hasard m'a mis à son contact deux fois dans la même journée. Je suis toujours intrigué par ces hasards bienvenus, ces circonstances qui nous apportent l'élément manquant au moment où nous en avons besoin. Jamais de notre vie nous n'avions rencontré tel nom, tel détail d'histoire, de biologie ou de tout autre domaine, et, tout à coup, l'avalanche se déclenche, comme si ce nom, ce détail faisaient partie de la vie de tous les jours de tout un chacun.
Pour les voitures, c'est pareil. Maintenant que j'ai une kangoo, je ne vois que ça dans les rues. Mais sans doute est-ce dû au simple fait que je suis aujourd'hui plus attentif à ce modèle.

Pour le buddleia, je choisis de l'appeler arbre à papillons. Autant cette périphrase m'évoque quelque chose de gracieux et d'ensoleillé, autant le nom véritable est lourd, me fait surgir à l'esprit à la fois une bière américaine et un gros bonhomme joufflu. Je le reconnais, sans raison aucune. Mais ce sera arbre à papillons.

dimanche 20 juillet 2008

Confidences.

Oui, bon, d'accord, j'arrive. Bien sûr, j'en vois qui piaffent, qui s'impatientent, qui n'ont plus le moindre frein à ronger. Pourquoi diable nous parle-t-il de ces jeux à la noix et d'une loque alcoolique et mélomane? Sur les amants italiens, on commençait à se réveiller, mais comme d'habitude, il nous met l'eau à la bouche et puis, pffitt, rideau. Ça ne nous intéresse pas. Allez, vite, au fait, on veut savoir comment ça s'est passé! Des détails, du vrai, du scoop, du croustillant! Oui, hier soir, c'était comment?

Eh bien voilà, j'ai perdu ma virginité! Vous êtes contents cette fois? Rien ne sera plus comme avant. Je suis grand maintenant.

Attention, quand je parle de ma virginité, il s'agit bien entendu de celle de blogueur virtuel. L'autre, il y a .... , mais basta, ce n'est pas le sujet. Je me suis matérialisé aux yeux d'un autre blogueur en même temps qu'il me découvrait de même par les siens.

Reprenons du début. Mais si, mais si, puisque vous l'avez voulu!

Nous avions rendez-vous à 21h, presque sous la queue du cheval de Louis XIV, place Bellecour. Je suis arrivé à 21h02, en retard donc, ce dont j'ai horreur, mais j'avais une excuse honorable: la lumière merveilleuse qui baignait Gambetta (le cours, Piergil, le cours) et les quais du Rhône, et une autre un peu plus prosaïque: la chaleur encore élevée et quelques courbatures résiduelles de mon parcours sportif du matin. Vous voyez, je vous dis tout!

21h02, donc. Personne. L'homme s'est-il si vite découragé? S'agit-il du premier lapin de l'été? Le temps de mettre le point d'interrogation à ma première question, il était là. Un sourire, une poignée de mains, un peu de gêne, je pense, de part et d'autre. Que fait-on?

Nous partons à la recherche d'un bar sur les quais de Saône. Tous sont en instance de fermeture. Dans la presqu'île, le café des Négociants regorge de monde. Nous nous installons tout près, à la brasserie Perl. Le dialogue se noue, d'abord un peu formel, puis de plus en plus décontracté. Nous échangeons sur nos goûts littéraires, musicaux, plus généralement culturels, échanges où se mêlent de plus en plus fréquemment des précisions sur nos vies privées, sur notre histoire respective.

Un peu gêné pour ma part par le brouhaha qui règne sur la terrasse autour de nous, je lui propose, si cela lui convient, d'aller faire quelques pas le long des quais. Sitôt dit, sitôt fait. A la hauteur de Saint-Georges et de la passerelle Abbé Couturier, nous nous installons sur un banc et continuons à bavarder. La confiance est maintenant totale, c'est du moins l'impression que j'ai. J'ai appris beaucoup de choses sur lui, je ne me sens plus "défavorisé" par les confidences de mes billets.
Nous abordons longuement le thème de la religion et autres sujets intimes.

Je l'ai quitté à 1h30 du matin, à l'angle du quai et du pont de la Guillotière. Une bise sur les deux joues, simplement, comme deux amis.
Voilà, vous savez tout.

Que vous dire de plus? Que je suis ravi d'avoir franchi le pas, que j'ai rencontré quelqu'un d'intelligent, de cultivé, de délicat et de profondément humain. Je sais qu'il va lire ces mots mais je ne les écris pas pour lui faire plaisir. C'est réellement ce que je pense, et j'espère bien avoir l'occasion de renouveller la rencontre. Mais je ne vais tout de même pas vous raconter chaque fois. Non, non, n'y comptez pas.

Marguerite.

Avant-hier, alors que la radio de ma voiture est toujours branchée sur France-Inter ou RCF, je me suis retrouvé, par je ne sais quel faux mouvement, sur des ondes inconnues où je suis resté le temps d'une chanson.

Une chanson que j'ai beaucoup aimée en son temps, par un chanteur dont la voix me faisait rêver en son temps également et dont on parle bien peu aujourd'hui. Une voix du sud, chaude, profonde, éraillée comme celle de la plupart de ses compatriotes mâles. Allez, je ne vous fais pas davantage attendre, je risque le coup de vous dévoiler mes goûts parfois de midinette en matière de chansons. Il s'agit de Richard Cocciante, et de son tub Marguerite. Vous vous rappelez:

Surtout ne m'en voulez pas trop
Si ce soir je rentre chez moi
J'ai tellement de choses à faire
Avant que le jour se lève.

Et pendant qu'elle dormira
Moi je lui construirai des rêves
Pour que plus jamais au réveil
Elle ne se lève les yeux en pleurs.

Quand je parlais de midinette!!!

Deux souvenir liés à cela.

Le premier à Cocciante, que je découvre en 1981, avec sa chanson Cervo a primavera. J'étais alors à Perugia, en Ombrie, à l'Université d'été pour Etrangers, la plus belle période de ma vie, je l'ai déjà dit. Le titre se partageait les ondes avec Malinconia, d'un autre Richard, Riccardo Fogli, aujourd'hui, je pense, totalement oublié. Moi, je n'ai pas oublié: j'ai sous les yeux le 45 tours que m'avait offert mon amant italien de cet été-là lors de mon retour en France. J'ai l'impression que c'était hier. Bon d'accord, avant-hier.

Le deuxième à Bons en Chablais. La maison derrière la nôtre était occupée par un couple atypique: la fille des propriétaires du Nord, Guislaine, alcoolique comme sa mère, et son ami belge, Luc, qui, lui aussi, ne crachait pas sur la bière. Vivotant au gré des saisons dans cette baraque qui menaçait ruine, travaillant tantôt oui tantôt non, jamais bien longtemps pour elle, revenant des grandes surfaces avec des provisions inimaginables de petites bouteilles, retrouvés parfois au petit matin dans leur voiture arrêtée parce qu'ils n'avaient plus eu la force de s'en extirper et de monter l'escalier branlant qui conduisait chez eux.

Nous devions parfois les calmer dans leurs disputes, la recueillir une soirée le temps qu'il se calme après l'avoir battue, leur faire baisser le son du disque de Johnny Halliday qu'ils passaient sans cesse et à tue-tête. Je la croyais plus vieille que moi d'une bonne dizaine d'années, elle en avait deux de moins. Physique ravagé, voix esquintée, toux persistante: une loque.

Et un jour, j'ai vu cette loque s'animer à l'évocation de Marguerite, se redresser et, d'une voix émouvante, presque belle, me chanter la chanson, sans en omettre un mot, sans en inverser deux couplets. Quand elle s'est arrêtée, à la fin du texte, elle avait les larmes aux yeux et, en regardant le sol, me lança que ça valait bien une bière sans doute. Bière que je lui offris. La parenthèse s'était refermée.

La page des jeux.

19 mars 62: oui, Gonzo avait vu juste. Il s'agit bien entendu de la guerre d'Algérie, plus exactement de la date du cessez-le-feu, le lendemain, je crois, des accords d'Evian.

En revanche, personne pour répondre à ma question sur ce qui peut relier Bourganeuf à Jean Racine. Un indice: il s'agit du titre d'une des pièces de Racine. Bourganeuf a un rapport avec un des personnages donnant son nom à une tragédie.

Enfin, j'en connais qui n'ont toujours pas choisi leur ours et leur lion préférés. Il ne reste qu'une dizaine de jours et, comme on dit à la télé, il faut à tout prix voter, car les scores sont "extrêmement serrés". Pour les oublieux, je rappelle que, dans les commentaires d'un de mes deux billets du trente juin, Gonzo a indiqué les liens pour une rétrospective aisée de tous les concurrents.

samedi 19 juillet 2008

Rencontre.

Ce soir, je dois rencontrer un blogueur. Première fois que cela arrive, le premier contact non virtuel s'étant déroulé au téléphone.

Cela me perturbe légèrement, en même temps j'en suis très heureux. Je ne peux pourtant m'empêcher d'être un peu nerveux. Je vais voir se matérialiser devant moi quelqu'un que je lis depuis un certain temps mais qui écrit peu et donc m'est encore passablement inconnu. Je l'imagine d'une certaine façon, il sera certainement d'une autre et c'est très bien. Tout à l'heure au téléphone, lorsque nous nous sommes fixé le rendez-vous, lui aussi avait l'air nerveux.

Pour moi, j'ai l'impression que je vais être nu devant un étranger: s'il a lu tout ce que j'ai écrit, il me connaît davantage que je ne le connais, je me suis confié, sans hésitation souvent, à cet écran. Je ne pensais pas qu'une rencontre se ferait aussi vite.

Étrangement, mais comme d'habitude, j'aurais beaucoup moins d'appréhension s'il s'agissait d'une femme. Je me fie à leur côté maternel, tendre et sans doute ai-je eu toujours plus de facilité à les "séduire" que les hommes. J'emploie "séduire" au sens d'établir rapidement un contact chaleureux et apaisé, empreint de confiance réciproque. Avec un homme, je suis plus tendu, plus bêtement sur la défensive, si c'est un hétéro pour me cacher, d'une certaine façon, si c'est un homo pour ne pas risquer le malentendu.

Une bonne occasion pour tenter d'être simple. Il fait chaud, je vais sans doute laisser la carapace à la maison.

Momentini.

Hier, en rentrant du lac, j'ai cueilli dans les friches avoisinantes un bouquet de fleurs champêtres. Je dirais du lilas sauvage s'il s'était agi d'un arbuste. Non, ce sont de grandes plantes à hampes très élancées et très peu résistantes qui produisent ces fleurs mauves apparentées, par leur forme et leur couleur, aux fleurs de lilas. L'odeur, elle, diffère. Aujourd'hui, mon appartement sent le miel et le pain d'épices.

Hier soir, longue conversation téléphonique avec Michel, l'ancien ami d'Amédé, qui vit maintenant depuis six ans à Paris. Au chômage depuis déjà longtemps, il a réussi un concours pour accéder à une formation poussée et sérieuse. Je suis surpris et heureux de sa fidélité. C'est toujours lui qui appelle, pourtant j'ai beaucoup de plaisir à ne pas le perdre de "vue". Parfois, je néglige certains de mes amis.

Sur le trottoir, tout à l'heure, deux femmes bavardent. Je les aperçois de loin. Devant elles, il y en a une troisième, dans un fauteuil roulant. L'une des valides appuie ses deux mains sur les épaules de l'infirme, sans doute pour la faire patienter. C'est le seul lien qui semble encore les relier. Sinon, l'infirme est solitaire, oubliée. Lorsque je m'approche, cette femme assise me paraît ressembler à ma mère: la même vieillesse, la même fragilité de corps, le même tassement contre le dossier, la même légère impudeur dans la robe un peu trop haut troussée. Les appuie-pieds relevés, elle a les deux pieds posés au sol, prête, dirait-on, à se lever. Les deux autres ne font pas attention à moi. Elle, elle me fixe et, au moment où je vais passer, me sourit d'un sourire édenté et me tend les bras, comme pour me dire: "Emmène-moi!". Je lui ai rendu comme j'ai pu son sourire mais de l'eau m'empêchait maintenant de la voir.

J'ai enfin rangé les chemises d'hiver dans des caisses en plastique et sorti les chemisettes d'été. J'en retrouve certaines, de Pierre, dans lesquelles je rentre maintenant. J'ai enlevé d'un cintre et plié la veste d'intérieur que Pierre a porté pendant toute sa maladie et dont je ne peux me défaire. Avant de la ranger, je l'ai essayée, bêtement, pour quoi faire? Je ne peux encore impunément m'égarer dans mes placards.

Toujours en rangeant ce placard, j'ai retrouvé un pantalon de ville dont les ourlets ont été marqués aux épingles de sûreté par Kikou et attendent encore d'être cousus. Je n'ai aucun souvenir de cet achat. Combien de choses mets-je ainsi entre parenthèses?

Je n'aime pas la mélancolie que je traîne depuis mon réveil et que la course autour du lac de Miribel n'a pas réussi à effacer ce matin.

vendredi 18 juillet 2008

Photos de Creuse.

Plutôt que de glisser maintenant les photos de Creuse dans les billets correspondants, les voici toutes réunies ici, avec les légendes nécessaires à la bonne compréhension.

Le "chalet": des nuits de onze heures!

L'église et son chapeau de pénitent.

La rue.

Une autre rue, au nom rare.

De la fenêtre du chalet, à l'est, soleil levant.

Les roses de Noëlle.

Bourganeuf. Qui peut me dire le rapport avec Jean Racine? (C'est une vraie question, un mini concours, si vous voulez, où l'on ne gagne rien.)

L'un de ses (ex)commerces.

Une des rares photos réussies du feu d'artifices.

Tantôt ça.

Tantôt ça.

Et parfois ça.